Chapitre 10 : au bloc opératoire
Comme je n’ai pas très bien dormi cette nuit, j’en ai profité pour lire en détail le livret d’accueil* qui m’attendait sur la table de nuit. Il présente la clinique, les services, mais surtout il insiste sur deux points essentiels, les « droits des patients* » et les « vigilances* », qui font partie de la politique « qualité et sécurité des soins* ». Le respect des fameux droits des patients est, depuis la loi Kouchner de 2002, la préoccupation constante des professionnels de santé. C’est la base de l’éthique médicale*. C’est encore plus vrai dans le secteur privé, car les praticiens engagent leur responsabilité* personnelle, alors que dans le public, c’est la responsabilité de l’établissement qui est en cause. Je lis qu’il y a une « commission des usagers* » qu’il est possible de saisir en cas de litige, et que tout « dommage associé aux soins* » doit faire l’objet d’une annonce auprès du patient qui a subi le dommage. Est-ce que tout cela est fait en pratique, ou s’agit-il de simples déclarations d’intention ? J’espère ne pas avoir à l’expérimenter !
Quant aux vigilances (ce terme fait un peu météorologique), elles concernent un grand nombre de domaines, depuis l’identité du patient jusqu’aux différents comités, comme le CLIN, qui coordonne la lutte contre les tristement célèbres infections nosocomiales*, ou le CLUD, qui organise la prise en charge de la douleur. Pour ce qui est de l’identitovigilance, la mise en place d’un bracelet que je porterai pendant toute mon hospitalisation aura été un des premiers gestes dont le personnel se sera acquitté. C’est un peu infantilisant, mais finalement assez rassurant.
Le livret indique les résultats des différents indicateurs*. Je constate avec plaisir que la clinique obtient partout de bonnes notes. Mais est-ce que cela reflète bien la réalité ? Le livret ne précise pas le taux observé d’infections nosocomiales, car l’accent est mis sur les moyens mis en œuvre, pas sur les résultats constatés. Le livret annonce fièrement que la clinique a été certifiée* par la HAS* sans aucune réserve. Le must, en fait. Apparemment, je suis bien tombé, d’autant qu’il est indiqué que le personnel a été formé à la « communication thérapeutique », qui permet d’utiliser un langage rassurant pour les patients. J’apprends ainsi que, lorsque le cerveau est en « conscience virtuelle », notamment du fait de l’anxiété, il ne comprend que les messages simples, et pas les négations. Si une infirmière, croyant bien faire, dit à son patient une phrase du genre « n’ayez pas peur, cela ne vous fera pas mal », le cerveau risque de n’entendre que les deux mots qu’il redoute, « peur » et « mal ».
Je peux m’endormir l’esprit tranquille.
*
C’est le matin. On est réveillé tôt dans les établissements de santé ! Je suis à jeun depuis minuit, et j’ai passé une nuit assez correcte, sans cauchemar ni angoisse particulière. C’est l’heure de la dernière douche à la Bétadine. Puis on me pose une perfusion*, par laquelle on me passe un antibiotique. L’infirmière m’explique que c’est l’antibioprophylaxie*, qui doit commencer idéalement une heure avant le début de l’intervention. Je suis le premier patient du Dr G., comme on me l’a annoncé hier soir. Là encore, je me demande si c’est une faveur qui m’est faite, ou si c’est dû aux nécessités de la programmation*. Mais peu importe, cela m’évitera de gamberger trop longtemps.
Le brancardier (ce sont surtout des hommes qui remplissent cette fonction plutôt physique) me fait passer de mon lit à son brancard. En route pour le bloc opératoire, situé au rez-de chaussée. L’ascenseur dédié au brancardage* nous dépose en douceur à l’entrée du bloc. Mon brancard n’a pas l’autorisation de franchir la ligne jaune peinte au sol. On me fait passer sur un brancard du bloc, et on me pose, pour la première mais pas la dernière fois, la question rituelle : comment vous appelez-vous ? Heureusement que je ne suis pas Alzheimer !
J’entre enfin dans le saint des saints, véritable forteresse dans laquelle les personnes qui y travaillent ne pénètrent que munies d’un badge et habillées d’une tenue de bloc de couleur bleue ou verte, qu’elles quitteront pour circuler dans le reste de la clinique. Je suis surpris par l’agitation et le bruit ambiant. Je m’attendais à un silence de cathédrale, mais pas du tout. Il faut dire que c’est leur lieu de travail quotidien, et qu’ils vont y passer toute la journée. Ils ne sont donc pas stressés par l’endroit, contrairement aux patients qui pénètrent dans cette enceinte pour la première fois. Mais tout va être fait pour que je me sente calme et paisible, zen comme on dit de nos jours.
Et, à ce propos, est-ce que j’ai peur ? Il paraît que beaucoup de gens qui doivent avoir une anesthésie générale ont peur essentiellement de ne pas se réveiller, bien qu’on leur dise que c’est absolument exceptionnel. A-t-on peur de prendre sa voiture quand on sait qu’on peut très bien avoir un accident, et ne jamais arriver ? Pour ma part, la réponse est non, je n’ai pas peur.
Le personnel qui m’accueille me pose les questions rituelles de la première étape de la « check-list* », comme dans un avion. J’apprendrai plus tard, par mon chirurgien, que cette check-list obligatoire, mais de mise en place récente, comporte trois étapes, la première avant l’entrée en salle d’opération, la deuxième juste avant l’incision*, la troisième à la fin de l’intervention. On me redemande mon identité (on voit mal comment des erreurs seraient possibles, et pourtant il y en a parfois, paraît-il !). On s’assure que je suis bien à jeun, que j’ai vidé ma vessie. On s’inquiète de savoir si j’ai du « matériel implanté* ». Il y a encore d’autres questions, notamment sur les allergies éventuelles. On me demande de quoi je vais être opéré. Je suppose qu’ils le savent. Bien sûr qu’ils le savent, je suis stupide…
Cette première étape, ce hors d’œuvre, se déroule dans une petite salle dite de « préanesthésie* », attenante à la salle d’opération proprement dite. C’est dans cette salle que le personnel, composé exclusivement d’infirmiers des deux sexes, comme l’exige la réglementation (c’est le diplôme infirmier qui est réglementaire, pas la parité homme-femme !), réalise un certain nombre de gestes techniques, comme la pose d’une seconde perfusion, au cas où la première ne fonctionnerait pas correctement. C’est également dans cette pièce que l’anesthésiste va me poser la péridurale* antalgique, destinée à éviter que je n’aie mal pendant les quarante-huit premières heures. Du coup, comme cette péridurale nécessite une surveillance particulière, je passerai les deux premiers jours en Unité de Surveillance Continue* (USC). Mais ça, on me l’avait déjà dit. Entre professionnels, la coutume est de dire qu’ils « techniquent » le patient. C’est un peu terrifiant comme façon de parler, quand on y pense. Mais ils ne le disent pas devant nous, fort heureusement.
Je vais bientôt entrer en scène, c'est-à-dire dans la salle d’opération proprement dite (au fait, on dit opération ou intervention ? Les deux indifféremment, d’après ce qu’on m’a répondu quand j’ai posé la question). Les anglo-saxons disent d’ailleurs theater room, qui colle bien avec le côté représentation théâtrale de la chose. Mais ce sont les autres qui vont jouer la pièce, dont je ne serai même pas le spectateur, puisque je serai plongé dans le sommeil* anesthésique.
Je suis maintenant sur la table d’opération*, pas complètement nu puisque je porte depuis ma chambre une culotte bleue en « non tissé » assez grotesque, ainsi qu’une « charlotte » tout aussi ridicule. Je regarde autour de moi ; je suis effrayé par le nombre de machines que contient cette salle ; effrayé, mais en même temps rassuré par cette débauche de technologie, d’autant que le personnel va m’expliquer à qui servent toutes ces machines, à commencer par le respirateur*.
Pour que je n’attrape pas froid, on m’a recouvert d’une espèce de couverture de survie à usage unique, qui sera remplacée par une couverture chauffante pendant l’intervention, comme me l’explique la personne qui se présente comme IADE, en clair l’infirmier anesthésiste (diplômé d’état), qui me décline son prénom et sa fonction comme tous les autres membres de l’équipe le font. Un silence relatif s’installe : l’anesthésiste procède à l’induction*. C’est le grand calme : je suis dans l’œil du cyclone. Je perds conscience, mais pas confiance. Rideau…
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Du côté de Gilbert P., l’anesthésiste, tout se passe comme sur des roulettes : intubation* facile ; pas de décurarisation* intempestive ; il va être possible d’extuber* le patient sur table avant de le passer en salle de réveil*. Le chirurgien est de bonne humeur, comme la plupart du temps. Gilbert aime bien travailler avec lui ; il est respectueux de chacun, y compris des anesthésistes (ce n’est malheureusement pas toujours le cas) ; il opère vite et bien ; en fait, s’il opère vite, ce n’est pas qu’il soit virtuose, mais parce qu’il ne perd jamais aucune seconde, sachant exactement ce qu’il a à faire dans l’instant qui suit. Avec lui, ça ne saigne quasiment jamais, et les conversions en laparotomie sont exceptionnelles. Et puis, il a très bien formé ses aides-opératoires*, surtout Anne-Marie, celle qui l’aide aujourd’hui. C’est probablement sa préférée, professionnellement s’entend, bien sûr. Qu’est-ce que vous allez chercher ! Et en plus, il remercie toujours l’équipe avant de quitter la pièce. Un mec bien élevé ; en fait, un type bien, tout simplement.
*
C’est la première intervention de mon programme opératoire, un « côlon cœlio » pour cancer du sigmoïde. J’aime bien ce patient, prof de philo, avec qui j’ai quelques goûts en commun. Du coup, j’ai demandé, lors de la réunion de programmation hebdomadaire, à ce qu’il passe en premier, prétextant auprès de la « chef de bloc*» qu’il était anxieux, ce qui n’est pas faux. Mais je ne l’ai pas dit au patient.
Je suis content que ce soit Gilbert l’anesthésiste du jour. Professionnellement, ils sont tous bien, mais humainement, c’est celui que je préfère, et pas seulement parce qu’il est cultivé et que nous pouvons parler d’autre chose que de médecine. Nous nous sommes aperçus que nous étions tous les deux des « fans » de l’historien de la philosophie Lucien Jerphagnon. C’est plutôt rare, cette communauté d’intérêt. Lui au moins il prend en compte le stress du patient avant l’induction, et ne raconte pas d’histoires drôles tout en poussant ses drogues*. J’en ai même connu un qui, adepte du tir sportif, entrait en salle avec son Colt ! Authentique…
L’intervention se passe bien, le patient est correctement curarisé*, et je n’ai pratiquement rien à demander, tant l’équipe connaît ma façon de travailler. Les trois aides opératoires que nous partageons avec mes deux associés sont toutes très bien, parce que nous les avons bien formées, mais c’est Anne-Marie, qui m’aide aujourd’hui, qui a le meilleur feeling avec moi, bien qu’elle ne soit pas « IBODE », c’est-à-dire infirmière de bloc opératoire diplômée d’état, formation qui prépare surtout à la fonction d’instrumentiste*. Or, en clinique, nous n’avons pas d’instrumentiste, ça coûte trop cher. On travaille à deux, et à trois pour les interventions complexes.
La pièce opératoire* est « tombée » ; l’anastomose mécanique* est faite ; il ne reste plus qu’à contrôler son étanchéité, et ce sera fini pour ce premier patient. Une fois posé le dernier point de suture* cutanée, l’intervention proprement dite est terminée.
Après, c’est la corvée administrative des paperasses à signer, des codes CCAM* à rentrer dans l’ordinateur, du bon d’ana-path* à remplir, et du compte-rendu opératoire* à dicter pour la secrétaire. Ce CRO est un document médico-légal qui décrit par le détail le déroulé de l’intervention. Un de mes maîtres, François D., disait qu’une intervention n’est terminée que quand le compte-rendu est dicté. Je n’ai jamais oublié cette leçon…
Cette première intervention s’est déroulée comme prévu, sans aucun incident. Il faut dire que je suis entouré par une équipe de premier ordre, dont le professionnalisme est la principale qualité. Je les remercie tous collectivement.
Je change de salle pour le patient suivant ! La journée opératoire est encore longue…
Quant au patient, il est devenu un opéré, en fait « mon » opéré car les médecins en général, et les chirurgiens en particulier, sont très possessifs avec leurs malades. Beaucoup de professionnels vont certes s’occuper de lui, mais il restera, pendant tout son séjour, et même après, mon patient, dont j’ai la responsabilité.
*
Vous allez peut-être me trouver envahissant, mais il n’est peut-être pas inutile que le chirurgien que je suis vous donne quelques détails sur la façon dont se déroule, en pratique, une intervention, sachant que c’est très variable d’un opérateur à l’autre, mais avec cependant des étapes incontournables.
Dans un premier temps, le patient est installé sur la table d’opération, le fameux « billard ». A ce propos, saviez-vous qu’à l’époque où les gens aisés se faisaient opérer à domicile (l’hôpital, c’était pour les indigents), le plan dur idéal pour procéder à cette intervention était le billard que l’on trouvait dans toutes les bonnes maisons bourgeoises ? C’est là l’origine de l’expression « passer sur le billard » connue de tous, et encore très employée par certains patients, tout comme celle que j’aime forcément un peu moins, « se faire charcuter ». C’est désobligeant pour les chirurgiens et les charcutiers.
Le patient est d’abord dans les mains de l’équipe anesthésique. Je viens le saluer avant qu’il ne s’endorme. Je le fais à chaque fois que c’est possible, mais, en pratique, quand je passe d’une salle à l’autre, le patient suivant est déjà prêt à être opéré pendant que je termine l’intervention précédente. Il est donc déjà endormi. Cette organisation permet de gagner beaucoup de temps, mais c’est un luxe qui n’est pas toujours accessible, dans la mesure où cela nécessite deux fois plus de personnel que quand on opère les patients les uns à la suite des autres dans la même salle.
Mon aide opératoire s’est déjà lavé les mains, de sorte qu’elle pourra commencer l’installation du matériel (« faire sa table d’instruments* ») une fois que le « champ opératoire* » aura été fait. Mais il faut, pour cela, que le patient soit endormi, ce qui peut parfois prendre plus de temps qu’à l’habitude, notamment en cas d’intubation difficile. Pendant que tout cela se met en place, selon un rituel immuable, je me lave les mains selon un rituel tout aussi immuable. Je rentre alors en salle d’op, et la « circulante* », que je continue à appeler par sa dénomination ancienne de « panseuse* » m’enfile la casaque* stérile et me présente les deux paires de gants que je mets l’une sur l’autre, pour plus de précaution. Toutes proportions gardées, cela s’apparente un peu à l’habillage du torero avant qu’il ne pénètre dans l’arène ! Je demande que l’on fasse le deuxième temps de la check list, et si tout est bon, je peux inciser, ce qui constitue le premier temps de l’intervention (on dit indifféremment intervention ou opération). L’heure de l’incision est notée par la circulante. C’est parti pour environ une heure et demie, si tout se passe normalement.
*
Même pour les patients qui ont connu l’expérience d’être opérés, certains à plusieurs reprises, le temps de l’intervention proprement dite reste un mystère. Et même si le chirurgien a largement perdu du prestige dont il était paré jadis, cette phase reste encore largement fantasmée, avec son lot d’idées toute faites et de poncifs. La première de ces idées préconçues, c’est qu’une opération se déroulerait comme une cérémonie sacrée, dans le grand silence des participants, chacun n’étant préoccupé que du confort de l’officiant, pour qu’il soit au top de ses indiscutables capacités. Il faut dire que c’est encore comme cela que les interventions sont présentées dans les fictions filmées, avec une armada d’aides opératoires toutes béates d’admiration pour leur patron, et dont l’une semble avoir pour unique tâche d’éponger le front dégoulinant de sueur du chirurgien. Beurk…
Tout cela est à des années-lumière de la réalité, beaucoup plus prosaïque que le public ne se l’imagine. Il faut dire que la façon dont se déroule une intervention dépend essentiellement de la personnalité de l’opérateur. Les plus pénibles sont assurément les chirurgiens stressés, que l’angoisse rend odieux, quand bien même ils seraient charmants le reste du temps. Certains exigent le silence, d’autres pas ; certains parlent tout le temps, d’autres pas ; certain opèrent en musique, d’autres pas ; mais la constante, c’est que le comportement de chaque chirurgien est à peu près immuable quand il opère, ce qui le rend prévisible pour le personnel. La seule variable est en fait l’humeur du jour du chirurgien ; certains sont toujours d’humeur égale, et, dans ce cas, il vaut mieux qu’il s’agisse d’une bonne humeur ; d’autres, dont je fais partie, ont l’humeur capricieuse, et je reconnais bien volontiers que si un membre de l’équipe m’a contrarié, par exemple en ne comprenant pas assez vite ce que je lui demande, je peux être assez désagréable. Et puis, il m’arrive, comme pour à peu près tout le monde, de m’être « levé du mauvais pied », et là, il me faut en général un peu de temps pour retrouver ma sérénité. Quand j’ai l’impression d’avoir passé les bornes, ce qui m’arrive hélas parfois, je finis toujours par présenter des excuses.
Et puisque j’ai commencé à expliquer comment je me comporte « au bloc », je vais continuer. Je parle peu en opérant, car je ne suis pas un grand bavard, et puis j’ai tendance à parler à voix basse derrière mon masque*, ce qui fait que l’on a parfois du mal à comprendre ce que je dis. Mais je n’empêche pas mes collaborateurs de parler, à condition qu’ils respectent une règle intangible : ils (en fait souvent elles) ne doivent pas pour autant quitter des yeux le champ opératoire, notamment en cœlioscopie (là c’est l’écran de télévision qu’il ne faut pas lâcher des yeux), car l’aide qui tient la caméra permet au chirurgien de voir ce qu’il est en train de faire ; il est à peu près impossible de tourner la tête pour parler à quelqu’un sans faire bouger la caméra. Enfin, bien que je sois un mélomane impénitent, je n’opère pas en musique, car je n’aimerais pas que l’on m’impose la musique à écouter (et inversement). La musique, quand on l’aime, ne doit pas être un simple bruit de fond.
Voilà pour le chirurgien que je suis. Mais, encore une fois, c’est très dépendant de la personnalité de chacun.
Notes
Aide opératoire : personne diplômée qui aide le chirurgien. Ce peut être une infirmière formée à cette fonction, ou un autre chirurgien, junior (un interne) ou senior (un chirurgien expérimenté pour une intervention délicate). Autrefois, c’était la secrétaire du chirurgien (voire sa femme), qui faisait office d’aide opératoire. Ce n’est plus autorisé depuis longtemps.
Anastomose mécanique : l’anastomose est le raccordement des deux extrémités digestives auquel procède le chirurgien après la résection de la tumeur. Réalisée autrefois « à la main » (anastomose manuelle), elle est faite de nos jours à l’aide d’une agrafeuse, d’où l’adjectif « mécanique ».
Antibioprophylaxie : dose unique d’un antibiotique délivrée avant que l’intervention ne commence, selon un protocole spécifique. Elle est destinée à prévenir les infections du site opératoire. Elle est réservée aux interventions à risque septique, comme ici la chirurgie colique.
Bon d’ana-path : document sur lequel l’opérateur rédige, à l’intention du médecin ana-path, un certain nombre d’indications : la nature de la pièce opératoire et les renseignements cliniques utiles au médecin.
Brancardage : fonction qui consiste à déplacer sur un brancard les patients hospitalisés, pour aller dans un autre service, notamment en imagerie ou au bloc opératoire. Cette fonction est dévolue soit aux brancardiers, dont c’est l’unique tâche, soit au personnel soignant, en dehors des horaires d’ouverture du service de brancardage.
Casaque : blouse stérile, actuellement à usage unique, qui recouvre les parties du corps du chirurgien et de son aide en contact avec le champ opératoire. Le nom de cette blouse varie selon les régions. En Bourgogne, par exemple, c’est un sarrau.
Certification : processus obligatoire et itératif piloté par la HAS, qui concerne tous les établissements de santé, publics comme privés, visant à s’assurer qu’ils respectent les règles de la qualité et de la sécurité des soins. Pour les médecins exerçant dans les disciplines à risque, ce processus individuel et facultatif porte le nom d’accréditation.
Champ opératoire : partie du corps de l’opéré sur laquelle va porter l’intervention. Elle est recouverte, par badigeonnage, d’un produit antiseptique, et délimitée par des « champs » stériles, actuellement à usage unique.
Check list : processus mis en œuvre sur le modèle de l’aviation, visant à s’assurer de la conformité des toutes les étapes de l’intervention (identité du patient, côté à opérer, etc.).
Chef de bloc : nom traditionnel donné au cadre du bloc. Doit-on dire « cheffe » de bloc quand c’est une femme qui occupe la fonction (c’est d’ailleurs souvent le cas) ?
Circulante : infirmière non habillée stérilement, dont le rôle est de raccorder les différents instruments, notamment ceux qui fonctionnent à l’électricité (bistouri électrique), et de donner à l’aide opératoire le matériel dont il (elle) a besoin au fur et à mesure du déroulé de l’intervention.
Code CCAM : CCAM veut dire Classification commune des actes médicaux. Chaque intervention est dotée d’un code spécifique alphanumérique qui sert à l’identifier. Le codage est indispensable à la facturation.
Commission des usagers (CU) : instance paritaire au sein de laquelle siègent des représentants des usagers (RU), activable en cas de litige entre un patient et l’établissement et/ou un praticien qui y exerce. Sert à régler, si possible, les litiges à l’amiable.
Communication thérapeutique : La communication thérapeutique est une façon de concevoir la communication avec les patients comme un élément du soin.
Compte-rendu opératoire : document à valeur médico-légale qui décrit le déroulé exact d’une intervention. Il comprend un certain nombre d’items obligatoires, comme le nom de l’opérateur et celui de l’anesthésiste. C’est un document technique, non destiné au patient, qui peut cependant demander à en disposer.
Curarisation : le relâchement de la musculature de la paroi abdominale, indispensable à la réalisation de certaines interventions digestives, s’obtient par l’injection intraveineuse de produits dérivés du curare. Quand les muscles sont effectivement bien relâchés, c’est que la curarisation est satisfaisante. La curarisation est indispensable à la réalisation d’une cœlioscopie. Elle entraîne une paralysie du diaphragme, ce qui rend nécessaire le recours à la ventilation assistée pendant la durée de l’intervention.
Décurarisation : quand l’effet de la curarisation s’interrompt inopinément, et que l’anesthésiste ne l’a pas anticipé, le patient se décurarise, ce qui rend momentanément la poursuite de l’intervention impossible. Le chirurgien dit alors improprement à l’anesthésiste « ton patient se réveille ».
Dommage associé aux soins : évènement non prévu, consécutif à un soin, et qui porte un préjudice plus ou moins grave à l’état du patient qui a reçu le soin. Le pire des dommages est, bien entendu, le décès imprévu d’un patient.
Drogue (anesthésique) : certains des produits utilisés par les anesthésistes sont qualifiés de « drogues », comme les morphiniques. On parle aussi de « toxiques ».
Droits des patients : ensemble des droits que les médecins et les soignants doivent respecter quand ils soignent un patient. L’un des plus importants de ces droits est d’obtenir le consentement du patient à tout soin qui lui est proposé. En regard, les patients n’ont que très peu de devoirs.
Ethique médicale : ensemble des règles qui gouvernent le comportement des médecins vis-à-vis des patients. Ce n’est pas la même chose que la déontologie. La bioéthique, c’est l’éthique appliquée à la recherche médicale.
Extubation : Retrait de la sonde d’intubation. Peut se faire « sur table » ou en salle de réveil.
Haute Autorité de Santé (HAS) : Organisme national indépendant qui gère différents aspects de la vie médicale, notamment la certification des établissements de santé et l’accréditation des médecins.
Incision : ouverture cutanée avec un bistouri. Dans la cœlioscopie, il y en a plusieurs (les « petits trous » dont parlent les patients).
Indicateur : Dans le domaine de la démarche qualité, essentielle dans les établissements de santé, les indicateurs permettent de mesurer le travail effectué et le chemin qui reste à parcourir avant d’atteindre l’objectif fixé.
Induction : c’est le début d’une anesthésie générale, période pendant laquelle le patient s’endort. Il est important qu’elle se passe dans le calme.
Instrument : les outils dont on se sert en chirurgie sont des instruments.
Instrumentiste : infirmier (ière) qui assiste l’opérateur en lui présentant les instruments. On n’en trouve a priori que dans les grands centres.
Intubation : mise en place, dans la trachée, de la sonde (un tube) qui va permettre de relier le patient au respirateur. Elle peut être parfois difficile à réaliser (« intubation difficile »).
Livret d’accueil : livret interne à l’usage des patients que l’on trouve dans tous les établissements de santé. Il sert à présenter ce dernier aux personnes hospitalisées.
Masque : également appelé « bavette ». Il se place devant le nez et doit être porté pendant toute la durée de l’intervention par toutes les personnes présentes dans la salle. Il n’est pas stérile.
Matériel implanté : tout type de matériel présent dans le corps du patient. Exemples de dispositif médical implanté : un pace maker ou une prothèse articulaire.
Nosocomial : qui survient à l’hôpital. Adjectif accolé quasi exclusivement au mot infection. Une infection nosocomiale se contracte pendant un séjour hospitalier, contrairement à une infection communautaire.
Panseuse : ancien nom, mais toujours employé, de la « circulante ».
Perfusion : solution qui passe dans les veines à l’aide d’un cathéter. Par extension, le matériel employé dans ce but.
Péridurale : une des eux modalités de l’anesthésie rachidienne, l’autre étant la rachianesthésie. La seconde est utilisée pour l’anesthésie, la première pour l’analgésie, comme dans « l’accouchement sans douleur ».
Pièce opératoire : c’est l’ensemble de ce que le chirurgien a réséqué, et qui sera analysé au laboratoire d’ana-path. Une biopsie n’est qu’un fragment de lésion.
Préanesthésie : tout ce qui précède l’anesthésie, et qui se fait souvent dans une petite pièce dédiée à cette étape.
Programmation : planification des interventions de la semaine : ordre de passage des patients, matériel nécessaire, etc.
Qualité et sécurité des soins : ensemble des processus et protocoles élaborés dans le cadre de la « démarche qualité », visant à la meilleure qualité possible des soins, et à leur sécurité maximale. C’est ce sur quoi porte la certification.
Respirateur : machine à laquelle le patient sous anesthésie générale et curarisation est raccordé, et qui assure la ventilation artificielle du patient pendant l’intervention, et même parfois après celle-ci.
Responsabilité médicale : bien entendu, un médecin est toujours moralement responsable de ses actes. En cas de problème aboutissant à une plainte, le juge recherchera si la responsabilité du médecin est engagée dans la survenue de la complication. La responsabilité médicale peut être civile, pénale ou administrative. Les médecins libéraux doivent souscrire des assurances en « responsabilité civile professionnelle » pour couvrir ce risque. Les montants des polices sont de plus en plus élevés du fait de la judiciarisation croissante dans les spécialités dites « à risque » (anesthésie, chirurgie, obstétrique).
Salle de réveil : actuellement dénommée SSPI (Salle de soins post-interventionnels), elle fait partie du bloc opératoire, mais avec un personnel dédié. L’opéré y séjourne plus ou moins longtemps, le temps de son réveil complet.
Surveillance continue : il ne s’agit pas d’une réanimation, mais d’une unité, l’USC, dédiée à la surveillance continue des patients « lourds » sur le plan médical. Elle n’est pas réservée aux seuls opérés.
Sommeil : le sommeil anesthésique n’est pas un sommeil naturel. C’est la perte de conscience provoquée par l’anesthésie générale.
Suture : on peut suturer des organes pendant l’intervention, et la peau en fin d’intervention. La suture cutanée est le temps de fermeture de l’incision, qui met fin au travail du chirurgien, mais pas à l’intervention.
Table d’opération : table spécifique à la chirurgie, destinée à recevoir l’opéré. Il y en a une par salle d’opération. Elle doit pouvoir bouger dans tous les sens (tête en haut, en bas, montée ou descente, etc.). Avec le développement de la chirurgie bariatrique, elle doit pouvoir supporter le poids de patients obèses.
Unité de Surveillance continue (USC) : service d’hospitalisation dans lequel sont hospitalisés des patients nécessitant une surveillance continue. Parfois appelée à tort Unité de Soins intensifs (USI). Il y a trois degrés de prise en charge des patients « lourds », par ordre de technicité croissante : la surveillance continue, les soins intensifs, enfin la réanimation.
Vigilance : tous les aspects qui doivent faire l’objet d’une attention particulière, et d’un signalement par le correspondant de la vigilance en question en cas de problème. Exemples de vigilance : l’hémovigilance, l’infectiovigilance, la matériovigilance.
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